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Aziza jalel : Une carrière à l’envers

Autant, peut-être, que les événements de Libye et d’Iraq, le retour sur scène de la chanteuse Aziza Jalel a défrayé la chronique ces dernières semaines.
Ce retour concernait, d’abord, une des plus grandes stars arabes. Partie de son pays natal, le Maroc, fin 70, vite révélée et montée au firmament en Egypte même, fief des icônes historiques du chant.
Il s’effectuait, surtout, après plus de trente-cinq années d’interruption. Jamais voix d’ici ou d’ailleurs n’avait pu reprendre après un si long «creux». De quoi intéresser public et critique, bien sûr. A l’époque du buzz, principalement, de quoi exciter les médias.
L’opération s’est concrétisée le jeudi 26 décembre au festival de Chitaa Tantoura en Arabie Saoudite, à travers un concert unique de près de deux heures, retransmis en direct par la toute nouvelle chaîne MBC 5.

Ce qu’en furent l’audience et l’impact ? De taille, reconnaissons-le tout de suite. On sait le pouvoir télévisuel de la maison MBC sur le continent. On connaît ses moyens et ses appuis. Aziza Jalel a elle-même avoué que sa décision de reprise a, surtout, eu lieu sur demande et insistance des deux monarques, saoudien et marocain. N’oublions pas, non plus, que l’artiste est veuve de Ali bin Butti al Ghamdi, richissime homme d’affaires proche (nécessairement?) de la famille royale saoudienne. Cela a joué et compté, à coup sûr, en capitaux versés et en potentiel publicitaire. En «propagande» même, dira-t-on. De nombreux chroniqueurs et signatures réputés du Khalij, de Syrie, d’Egypte et du Liban ont plaidé systématiquement la cause et de la chanteuse et du gala. L’argent «princier» a pu circuler «à flots».

Sujet à doutes, d’autant que le concert a péché, plutôt, par son contenu.
Par les nombreux manques de Aziza Jalel elle-même.
A commencer par la voix, l’organe de base, le timbre, qui a épaissi naturellement, avec l’âge, et après plus de trente-cinq ans d’inactivité.

En poursuivant par ce qui(nous) a fait le plus mal : la perte de justesse, et les difficultés à tenir les tonalités. Quasiment «disparue» la Aziza Jalel des débuts, la merveilleuse cantatrice de début 80, celle dont l’accent nasillait avec extrême douceur, marque d’aristocratie vocale, celle qui sautait allègrement les registres, celle qui cumulait toutes les couleurs du chant.
La Aziza Jalel exhibée, en lieu et place, aujourd’hui ?

La chanteuse sans maîtrise, par effet de l’âge. La voix sans teneur, sans éclat. Mais en «posture» seule de chant. La scène large, l’orchestre volumineux, le public choisi, acquis :de la poudre aux yeux.
Ce à quoi ont conclu quelques voix critiques, hors d’influence, est probablement vrai. Aziza Jalel a disposé de ce qu’elle a eu comme carrière un peu «n’importe comment». Elle a tout abandonné pour une «noce princière» au plus fort de son talent et de sa réputation. Et elle revient à «la charge» trente-six ans plus tard, quand, de toute évidence, tout cela ne lui est plus permis.
Une «conduite à l’envers», c’est sûrement le cas.

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